Le second confinement national cristallise les craintes d’un nouvel état d’urgence qui pourrait s’installer dans la durée. L’histoire se répète et les conséquences restent les mêmes.
Confinement, couvre-feu, attestations de déplacements, autant de mesures prises cette année pour contrer la pandémie de Covid-19. Mis en place au mois de mars dernier, l’état d’urgence sanitaire a permis l’implantation d’un panel d’outils pour contrôler la population. Ce régime juridique spécial permet de prendre des mesures rapides et exceptionnelles contre la propagation du virus. Mais la grogne des Français monte pendant ce second confinement face à une situation perçue comme une nouvelle privation de liberté.
Outre l’appellation, il n’est pas sans rappeler l’état d’urgence sécuritaire consécutif aux attentats de novembre 2015. Proclamé par François Hollande le soir même des attaques, l’état d’urgence avait été instauré pour une durée de trois mois.
Celle-ci a permis de conserver certaines mesures de l’état d’urgence pour les intégrer dans le droit commun.
Par exemple, un préfet peut ordonner l’assignation à résidence, dans la limite de sa commune, d’une personne soupçonnée de terrorisme. Il peut aussi exiger la fermeture d’un lieu de culte ou une “visite domiciliaire”, comprendre une perquisition, à toute heure du jour ou de la nuit.
Toutes ces mesures héritées de l’état d’urgence peuvent être prises uniquement dans le cadre strict de la prévention d’actes terroristes. Mais elles ne sont de la responsabilité que de l’autorité administrative (Ministre de l’Intérieur et préfets), et non de la justice. Cette loi a été vivement critiquée par les professionnels du droit. Près de 500 d’entre eux ont tiré la sonnette d’alarme dans une tribune parue dans Libération et Mediapart, craignant des dérives liberticides difficilement contrôlables.
Un état d’urgence sanitaire vraiment nécessaire ?
Cette année le gouvernement a donc décidé d’imiter ses prédécesseurs en répondant à la crise sanitaire par l’instauration d’un état d’urgence avec la loi du 23 mars 2020. Ce nouveau régime d’exception donne au Premier Ministre et aux préfets la possibilité de prendre par décret des mesures privatives de liberté. Confiner une ville, restreindre des déplacements, interdire une manifestation, les moyens ne manquent pas pour tenter de ralentir la circulation du virus.
Dans un communiqué daté du 23 juin, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) s’inquiète « de la prorogation par ce projet de loi de mesures particulièrement attentatoires aux droits et libertés ».
Pour l’après Covid ou dans l’éventualité d’une nouvelle menace épidémique de cette ampleur, il est facile d’imaginer le même cheminement. Assigner à résidence un malade, confinement d’une ville ou bien restrictions de déplacement, les pouvoirs attribués au gouvernement par l’état d’urgence pourraient perdurer.
La loi SILT a permis de rendre certaines mesures anodines, mais une question se pose : est-ce que de futurs états d’urgence nous amèneront à perdre certaines de nos libertés ? L’avenir nous le dira.